Quand, en 1894, le peintre Rémy Cooghe brosse son portrait, Jules Émile Scrive est âgé de 57 ans. Il exprime une bonhomie certaine que n'altère en rien le port altier de l'honnête homme sûr de son fait. On peine cependant à imaginer là une âme inquiète où le sentiment d’une honorabilité légitime s’accommode mal des tracas du quotidien et des interrogations sur le sens de l’existence. C’est pourtant ce que disent ses carnets, rédigés d’une écriture fine et serrée sur des pages pré-datées, finement quadrillées.
Treize années durant, entre 1879 et 1891, cet industriel malgré lui, héritier d’une prestigieuse dynastie de l’histoire du textile lillois, y consigne tout ce qui, à ses yeux, mérite d’être retenu, depuis les petits riens de la vie, les couleurs et les saveurs de l’ordinaire jusqu’aux considérations sur le sens du temps qui passe, les mystères de la foi ou bien encore les soucis d’un fabricant de toiles aux prises avec une conjoncture morose. En nous faisant part des infinies facettes de son existence, ce notable se déplie ainsi sans risque, à l’abri du monde, pour produire une trace qui devient récit de vie.
Si l’expérience transmise ici par l’un des « Maîtres du Nord » est par essence unique, ce n’est cependant pas au point d’interdire l’accès à l’universel par le singulier. Tout lecteur fera donc son miel d’un journal personnel qui, en relevant du for privé, constitue un observatoire privilégié quand il s’agit de restituer des manières d’être, de vivre et de penser d’un représentant de la bourgeoisie industrielle des dernières décennies du XIXe siècle.
Préface
Introduction
L'Aurès à l'origine
Chapitre premier :
Origines de la guerre et insurrection,
première Harka en Aurès
1. Mostéfa Ben Boulaïd, un « chef historique » chaoui
• 1.1. Origine du personnage
• 1.2. Un ancien soldat français, gradé, blessé et décoré
• 1.3. Un petit bourgeois
• 1.4. Une carrière politique « frustrée »
• 1.5. La préparation de l'Aurès à la « voie violente » dans un « cadre national »
• 1.6. Le bénéfice des lacunes de l'administration coloniale
2. La « Toussaint rouge » dans l'Aurès, le 1er novembre 1954
• 2.1. Ultimes préparatifs
• 2.2. L'attaque des grandes villes périphériques de l'Aurès
• 2.3. L'importance de l'insurrection à l'intérieur du massif
• 2.4. L'impact historique de l'insurrection dans l'Aurès
3. La situation à Arris, la levée de Harkis
• 3.1. À Arris, recrutement d'un goum
• 3.2. L'administration bénéficie des rivalités tribales, mises au point historiographiques
• 3.3. Mise en place et évolution du goum d'Arris
Chapitre II
Les formations supplétives chaouïa,
mobiles d'engagement, catégories et unités aurasiennes
1. Précis sur les Harkis : mobiles d'engagement et catégories
• 1.1. Aux origines des engagements des Harkis aurasiens
— 1.1.1. La volonté de rétablir l'ordre et de se protéger des « bandits »
— 1.1.2. Les mobiles liés à l'armée française
— 1.1.3. Les mobiles économiques
• 1.2. Panorama des diverses catégories de musulmans pro-français : supplétifs en tous genres et notables
— 1.2.1. Les Harkis, supplétifs de l'armée
— 1.2.2. Les mokhaznis (ou moghaznis) des S.A.S. (Sections Administratives Spécialisées)
— 1.2.3. Groupes Mobiles de Sécurité (G.M.S.) et Groupes Mobiles de Protection Rurale
(G.M.P.R.), des « supplétifs de gendarmerie »
— 1.2.4. Groupes d'autodéfense
— 1.2.5. Les appelés et les militaires de carrière
— 1.2.6. Les Harkis en chiffres
2. Les unités supplétives de l'Aurès, historiques et bilans
• 2.1. La Harka d'Arris et celle de Dissa, régularisation d'une Harka originelle et originale
— 2.1.1. Évolution de la Harka d'Arris
— 2.1.2. La Harka de Dissa
— 2.1.3. La Harka de Foum Toub
• 2.2. Historique des S.A.S. aurasiennes (journaux des marches et opérations de la création à la
fin juin 1959)
— 2.2.1. La S.A.S. d'Arris
— 2.2.1.1. Situation au 1er mars 1959
— 2.2.1.2. Marches et opérations de la S.A.S. d'Arris du 1er mars 1959 au 31 mars 1962
— 2.2.2. Les autres S.A.S. aurasiennes et leur situation par rapport à la rébellion
— 2.2.2.1. Origines et débuts de la S.A.S. de Bou-Ahmar
— 2.2.2.2. Origines et débuts de la S.A.S. de Medina
— 2.2.2.3. Origines et débuts de la S.A.S. de T'Kout
— 2.2.2.4. Origines et débuts de la S.A.S. de M'Chounèche et de l'Annexe de Dissa
— 2.2.2.5. Origines et débuts de la S.A.S. de Menâa
— 2.2.2.6. Origines et débuts de la S.A.S. de Bouzina
— 2.2.2.7. Origines et débuts de la S.A.S. de Teniet el Abed
3. Les pertes des unités supplétives aurasiennes
• Annexes relatives à la S.A.S. d'Arris 198
Chapitre III :
L'Aurès, théâtre de la guerre d'indépendance
algérienne (1954-1962)
1. Au lendemain de l'insurrection
• 1.1. Les reprises d'Arris et de T'Kout par les autorités coloniales
• 1.2. L'arrivée des parachutistes de Ducournau, la mort de Belkacem Grine
• 1.3. Les échecs des premières stratégies
• 1.4. Les voyages dans l'Aurès, Jacques Soustelle et Germaine Tillion
2. Aspect de la guerre dans l'Aurès
• 2.1. Les grandes opérations
• 2.2. Administration, regroupements et action psychologique
3. Dans les maquis aurasiens, de l'« apogée initiale » à l'anarchie ?
• 3.1. L'arrestation de Ben Boulaïd et ses conséquences
• 3.2. L'intérim et l'élimination de Bachir Chihani
• 3.3. Évasion, retour et mort de Ben Boulaïd
• 3.4. La « dissidence » matée dans le maquis chaouïa ou le régionalisme momentané contre le centralisme
F.L.N., une particularité aurasienne éphémère
• 3.5. Déclin de la wilaya 1 « orpheline »
Chapitre IV
Le devenir des Harkis aurasiens au cessez-le-feu
1. L'abandon quasi-généralisé des Harkis de l'Aurès
• 1.1. L'abandon programmé caché derrière des solutions proposées s'avérant dans les faits irréalisables
• 1.2. Y a-t-il eu épuration dans l'Aurès ?
2. Le « rapatriement » d'une partie des Harkis Chaouïa
• 2.1. Les conditions du « rapatriement »
• 2.2. L'accueil en France, les camps face à l'urgence
Chapitre V
Les Chaouïa dans le bassin de la Sambre :
logement, emploi et association
1. L'installation des ex-Harkis chaouïa et de leurs familles dans la région de la Sambre
• 1.1. Mme Couadou, le témoignage majeur d'une pied-noir philanthrope installée dans le bassin de la Sambre
— 1.1.1. Les débuts et les difficultés
— 1.1.2. Construction de l'ensemble de logements Sanacotra à Louvroil
• 1.2. La période d'avant crise économique
• 1.3. Une étude sur le quartier et les immeubles Sonacotra à la fin des années quatre-vingt
• 1.4. Le départ d'une minorité lié à la crise économique des années suivantes
2. L'évolution de l'emploi dans la communauté : à l'instar de la situation de la région
• 2.1. À l'arrivée des Harkis, le plein-emploi dans l'industrie lourde
• 2.2. La crise et le chômage
• 2.3. La politique d'aide à l'emploi en faveur des Harkis du Nord
• 2.4. La scolarité et la formation dans la communauté chaouie Harkie et la politique d'aide à l'éducation
• 2.5. Les interlocuteurs des Harkis dans l'État
3. Les associations des Harkis chaouïa du Bassin de la Sambre, notamment l'A.F.(M.)R.A.
• 3.1. Historique succint
• 3.2. La politique de l'État vis-à-vis des associations Harkies
• 3.3. Vie associative de l'A.F.R.A.
— 3.3.1. Une palette d'activités
— 3.3.2. Problèmes internes à l'A.F.R.A.
Chapitre VI
Sociologie de la communauté chaouïa du bassin de la Sambre,
définition, chiffres et pratiques
1. Essai d'étude de la communauté des Chaouïa sambriens
• 1.1. L'apport des évaluations concernant les Harkis du Nord, une population difficile à comptabiliser
• 1.2. L'oral au service de la constitution d'archives sur la communauté
— 1.2.1. Présentation de l'enquête
— 1.2.2. Résultats : des données sur la population chaouïa du bassin de la Sambre et des
commentaires démographiques
2. Cerner la population chaouie dans un « kaléidoscope identitaire » et mettre en évidence
les stratégies matrimoniales et communautaires
3. Les survivances religieuses et culturelles
• 3.1. La diversité du degré d'observance des pratiques et interdits islamiques
• 3.2. Les pratiques funéraires et le quasi-systématique rapatriement
• 3.3. Le culte d'une sainte immigrée et les offices d'un marabout local
• 3.4. L'état de transmission de la science culinaire aurasienne
Conclusion
• Quelle trace doivent laisser les Harkis dans l'Histoire ?
• Quel est l'avenir des Harkis chaouïa ?
• En revanche, que dire des Harkis restés là-bas, dans l'Aurès ?
• Qu'en est-il d'autres communautés chaouies de France ? Quels sont les liens entre elles ?
Sources
• Archives du service historique des armées du chateau de Vincennes (Paris)
• Archives d'outre-mer (Aix-en-Provence)
• Documents administratifs
• Documentation sur Usinor Louvroil
• Archives privées
• Archives associatives
• Archives conçues
• Sources orales
Bibliographie