Dix archéologues amateurs, que la pluie oblige à renoncer à une excursion, se racontent à tour de rôle les amours malheureuses de jeunes femmes, souvent belles et fortunées, que leur immaturité ou leur ambition entraîne parfois dans des situations assez scabreuses. Arrivés au terme de leur histoire, nos narrateurs, en bons victoriens qu'ils sont, se voient contraints, non sans ironie, à critiquer leur héroïne, dont la mentalité leur demeure, de toute façon, totalement étrangère.
Victimes des conventions sociales, frustrées dans leurs désirs amoureux, ballotées entre des sentiments contraire, ces "nobles dames" sont les jouets du destin et c'est une vision fort pessimiste du mariage, de l'amour et de la nature féminine que nous offre ce recueil. Sous l'anecdote, tantôt humoritique, tantôt mélodramatique, Thomas Hardy, comme dans Tess, aborde "des sujets auxquels tout le monde pense mais dont personne ne souffle mot" et souligne le côté mystérieux, parfois absurde de l'existence.
Par la simplicité et la portée universelle de leurs thèmes, ces nouvelles s'apparentent au conte parlé et à la ballade populaire. Si elles en ont les défauts, elles en ont aussi les qualités. Alors, écoutons ces histoires. Imaginons-nous installés au coin du feu, dans un musée empli de fossile où les oiseaux empaillés semblent "cligner de l'oeil". Les dix nobles dames, numérotées comme autant de pièces de collection, appartiennent au passé. Acceptons, comme Hardy nous les offre - avec un clin d'oeil -, ces ballades en prose des "Dames du temps jadis". Et ne boudons pas notre plaisir.