Livre inscrit au programme ReLire.
Toucher l'espace ? Ce titre peut surprendre car en tant qu'êtres humains adultes, nous avons un système visuel si développé que c'est surtout à travers lui que nous connaissons (ou croyons connaître) le monde. Pourtant,bien des raisons suggèrent que le toucher joue aussi un rôle important dans la cognition spatiale. Ainsi, si la main est d'abord et surtout un organe d'exécution des actions, elle constitue aussi un système perceptif efficace à travers lequel nous percevons les formes, les grandeurs, les directions et les orientations, les textures, etc, - à conditions bien sûr de ne considérer que l'espace proche de notre corps. De plus, étant extrêmement mobile, la main explore directement les trois dimensions de l'espace et accède donc à la face des objets cachée à la vue. Les capacités perceptives spatiales du système manuel apparaissent d'ailleurs clairement quand celui-ci se substitue à la vision défaillante : on sait que, grâce à l'utilisation intensive du toucher, les aveugles complets de naissance parviennent le plus souvent à mener une vie autonome. Qu'en est-il alors chez les voyants qui connaissent l'espace extérieur grâce à la mobilisation conjointe de l'oeil et de la main ? Quelles sont les capacités discriminatives réelles du toucher chez l'enfant et l'adulte voyants ? Les bébés, qui sont de redoutables "touche-à-tout", reconnaissent-ils d'emblée par la vue un objet qu'ils viennent d'explorer manuellement sans voir ou bien doivent-ils apprendre à mettre en correspondance leurs perceptions visuelles et manuelles ? Enfin, que se passe-t-il si les informations apportées simultanément par l'oeil et par la main sont en conflit ? Telles sont les questions auxquelles tente de répondre cet ouvrage qui, en retraçant la genèse des coordinations intersensorielles visuomanuelles, s'interroge sur la formation chez l'enfant d'un espace unique et cohérent.