Pasolini philosophe, Pasolini politique, penseur et guide, sinon maître pour notre temps. Pasolini, à l'instar de Rimbaud, le
voyant. Nous sommes en plein, trente ans après son assassinat, dans les problèmes qu'il a posés, ceux du conflit entre une mondialisation inhumaine dominée par l'économie marchande et un monde de valeurs en train de disparaître. Il fut l'homme de la résistance à l'heure du déclin.Emprunté à Walter Benjamin, autre penseur visionnaire de la modernité, le mot de « passages » que nous avons choisi pour titre entend exprimer, à la fois, ce glissement d'un monde à un autre, avec la lumière auratique dont se pare le premier à travers la grisaille envahissante du second, et les voies de traverse que suit notre méthode d'investigation.Dans l'oeuvre proliférante et multiforme, poétique, cinématographique, théâtrale, critique, comme les passages dans le tissu urbain, elle perce des perspectives. Elle accorde à l'analyse singulière, à la monologie, le pas sur la synthèse enveloppante. À la chronologie biographique, elle substitue des points remarquables. Arrêts sur
Théorème,
Salo, sur
Porcherie, ou tel entretien avec Pound, telle utilisation de Dante dans
Pétrole.Ces
passages peuvent être conçus également comme des lignes de fuite, au sens que Gilles Deleuze a donné à cette expression, c'est-à-dire des armes de combat.Et ils s'ouvrent sous le signe et les auspices d'autres grands noms : de Deleuze, précisément, de Dante, d'Ezra Pound, ou encore, de manière plus insolite, de Charles Fourier et de Spinoza.
René Schérer né en 1922, professeur émérite en Philosophie de l'Université de Vincennes-Paris 8 à Saint-Denis. Ses travaux concernent essentiellement la phénoménologie husserlienne, les problèmes de l'enfance et de l'éducation, l'oeuvre de Charles Fourier. On relèvera parmi ses publications récentes :
Regards sur Deleuze (Paris, Kimé, 1998),
Zeus hospitalier (2e édition, Paris, La table ronde, 2005) et, en 2006,
Charles Fourier, vers une enfance majeure, (Paris, La fabrique).
Giorgio Passerone est Maître de Conférences à l'Université de Lille 3, où il enseigne la Littérature italienne. Il a notamment publié La linea astratta. Pragmatica della stile (Guerini, Milano, 1991),
Dante. Cartographie de la vie (Kimé, Paris, 2001) et, en collaboration avec Carlo Arcuri,
Portulan. Gênes, carte politique et poétique (Presses Universitaires du Septentrion, Lille, 2004).