Dans tous les champs actuels du savoir, où se rencontre le même souci d'interprétation, le recours au concept de modèle témoigne d'une nouvelle conscience de soi propre au chercheur et à sa discipline: l'interprétation s'inscrit dans la perspective non plus d'une enquête mais qu'une quête qui repousse sans cesse devant soi, par son effort même, le réel vers lequel elle tend. On pourrait avoir l'impression, en ces époques de mutation des méthodes, que la science va à reculons. En fait, elle ne recule pas: elle prend seulement du recul. Elle mesure la relativité de ses explications: elle a conscience d'interpréter. Les recherches rassemblées dans ce volume sont, à des degrés variables, le lieu du jeu de la métonymie et de la métaphore. Parce que les éléments propres au modèle étudié entretiennent mutuellement un solide rapport de métonymie, le plus souvent causal, l'étude de ces éléments et de leurs rapports a requis l'attention de spécialistes. Mais la relation entre le modèle et ce que le modèle vise se révèle aussi, au travers de toutes ces analyses, foncièrement métaphorique. Dans le recul ou l'intervalle que la philosophioe découvre aujourd'hui entre la science et le réel, entre l'histoire de la philosophie et le discours produit par les philosophes, n'y aurait-il pas la prise de conscience contemporaine d'une survivance, irréductible et rebelle à toute expulsion, de ce qu'on nommme, peu importe le mot, relativisme ou pensée sauvage?