Depuis Homère, les penseurs de l'antiquité se sont intéressés à la nature, à l’usage et au contrôle de la colère. Cet article porte sur le plus ancien ouvrage sur le sujet qui ait survécu de l’antiquité jusqu’à nous, à savoir le traité Sur la Colère de Philodème, un important philosophe épicurien, actif en Italie du Sud au 1er siècle av. J.-C. De façon générale, il s’agit dans cet article de présenter, du point de vue historique, sémantique et méthodologique, le contexte de l’analyse par Philodème de la colère, ainsi que de reconstruire l’essentiel de son argumentation contre différents adversaires. La question comporte un débat sur la bonne façon de traiter la colère ; l’explication que donne Philodème de la nature, des symptômes et des conséquences de cette émotion ; la distinction qu’il opère entre colère naturelle (orge) et non naturelle (thymos), ainsi que son affirmation, que le sage peut à l’occasion resssentir la première, mais jamais la seconde ; enfin, sa réfutation de trois arguments en forme d’epilogismos qui soutiennent que le sage ne sera pas moins sujet à la colère que n’importe qui.

Summary. From Homer onwards classical thinkers were preoccupied with the nature, use, and control of anger. This paper discusses the earlier classical work on that subject surviving in part to our day, namely the treatise On Anger by Philodemus, an important Greek Epicurean philosopher active in Southern Italy in the 1st century BC. The overall aim of the paper is to supply the historical, semantic, and methodological context for Philodemus’ analysis of anger, and also to reconstruct Philodemus’ central argument against different opponents. Topics include a debate concerning the right method of treating anger ; Philodemus’ account of the nature, symptoms, and consequences of the emotion ; his distinction between natural anger (orge) and unnatural anger (thymos) as well as his contention that the sage occasionally feels the former but never the latter ; and his refutation of three arguments in the form of epilogismos which maintain that the sage will feel no less anger than the common man.