Allemagne d'aujourd’hui se présente dans un nouveau format et avec une nouvelle parure. Il est toujours difficile d’abandonner une présentation à laquelle collaborateurs, abonnés et lecteurs s’étaient sans aucun doute habitués depuis maintenant plus de quarante ans. Nous nous étions habitués au caractère austère des décennies passées jusqu’à la prise de conscience, à force de remarques répétées, que nous manquions peut-être de modernité et d’attractivité pour un public plus jeune. Mais faut-il changer pour changer, et en changeant, nous transformons-nous ? Quel est le message de ce changement ?

En adoptant le format 16 x 24 à la française, nous avons d’abord eu un souci de lisibilité et d’économie : présenter, sans trop remplir les pages ou agrandir inconsidérément le pavé imprimé, plus de texte tout en rendant la lecture plus aisée. Le changement de format s’accompagne de ce fait d’une présentation plus aérée dans une police d’imprimerie moins classique que le times new roman pratiqué jusqu’à maintenant. La police « futura » est à la fois une merveilleuse ouverture sur l’avenir comme la promesse d’une lecture agréable. Mais le plus grand changement assurément, c’est la couverture qui emprunte à la précédente en conservant des traits de l’ancien titre, tout en introduisant pour la première fois un visuel et en renonçant délibérément à présenter la totalité du sommaire du numéro. Elle présente également un nouveau logo et un élément décoratif qui crée, avec son carré rouge finement cerclé d’un entrelacs de traits, un nouvelle équilibre toujours à la recherche de lui-même. Comme la couverture annonce la thématique du dossier que comprend aujourd’hui chacun de nos numéros, les autres articles se retrouvent sur le dos de la couverture qui est aussi travaillé que la première de couverture par le prolongement du visuel.

L’introduction d’éléments visuels est la plus grande nouveauté et représente le plus grand effort de modernisation. Il fallait que ce visuel soit un message convaincant de la politique éditoriale de la revue. Si l’Allemagne ne se réduit pas à Berlin encore moins que la France à Paris, nous avons pourtant choisi de ne choisir que des photos qui représentent Berlin. Cela mérite explication. Dans un souci de lisibilité esthétique pour éviter de brouiller le message en multipliant l’énumération des symboles des grandes villes allemandes, nous voulions placer ailleurs que dans la géographie la diversité de l’Allemagne. En choisissant Berlin, nous avons voulu également dédramatiser l’appellation de « République de Berlin » et montrer que l’Allemagne, à travers sa capitale retrouvée, ne cesse d’être une tension entre passé et modernité : c’est encore une façon de dire que le retour sur la scène mondiale de ce pays puissant ne signifie pas rupture d’équilibre et oubli du passé. Aussi la première page de couverture insère-t-elle entre les deux éléments d’architecture moderne que sont la nouvelle Gare centrale de Berlin et les bureaux du Bundestag les deux visages de l’Allemagne du 21e siècle. Le monument à la mémoire des juifs d’Europe rappelle la volonté du pays d’assumer son passé tandis que la tour de télévision de l’Alexanderplatz, photographiée entre les deux panneaux du monument érigé du temps de la RDA à la mémoire des mouvements de libération nationaux, témoigne du passé est-allemand qui subsiste dans l’Allemagne d’aujourd’hui. Bundestag et Gare centrale sont placés des deux côtés de la Spree qui séparait à cet endroit la RFA de la RDA, la passerelle dont on ne voit ici que le départ du côté « occidental » se lance pour enjamber la rivière et rejoindre l’arc que dessine les poutrelles du toit de la Gare située « à l’Est ». Au dos de la couverture, place est faite aux symboles plus connus : porte de Brandebourg, bâtiment du Reichstag avec sa coupole qui exprime le besoin de transparence de toute démocratie ; la « Bahn-Tower », la tour de la Deutsche Bahn du Potsdamer Platz, et la coupole rénovée du Musée Bode symbolisent le double besoin de modernité architecturale sobre et la restauration du passé prussien via le bien le plus précieux de tout pays, c’est-à-dire sa culture.

Nous changeons pour être plus attrayant et plus lisible sans concession à notre exigence d’explication de l’Allemagne d’aujourd’hui dans la totalité de ses dimensions politiques, économiques, sociales et culturelles, et sans jamais oublier l’imbrication étroite entre le passé et le présent.

C’est à une jeune conceptrice imaginative de l’agence3C <www.agence3C.com>, Camille Lombardot, que nous devons la maquette de couverture et la charte graphique ; les photos sont l’œuvre d’un jeune photographe français talentueux qui évolue entre Berlin et Paris, Tristan Siegmann <www.tristansiegmann.com>. Nicolas Delargillière, des Presses universitaires du Septentrion, a transformé le concept en modèle opérationnel au quotidien tandis que Françoise Cokelaere a assuré la composition selon le nouveau modèle. Qu’ils en soient tous ici remerciés.

– Jérôme Vaillant et Jean-Louis Georget –