Au cours des quarante années d'histoire de la RDA, l'image officielle de la RFA a perdu peu à peu de son ton alarmiste dû à la conviction d’une menace latente durant les années 1950, au paroxysme de la Guerre Froide. L’image de l’autre partie de l’Allemagne demeura cependant une image de l’ennemi à laquelle on eut recours de façon offensive dans des situations de crise, intérieure ou extérieure. Au sein des élites politiques est-allemandes, le remplacement de l’image de l’ennemi « RFA » par l’image nuancée d’une République Fédérale considérée comme un voisin tout à fait normal, comme l’autre Allemagne – et non pas l’Allemagne ennemie -, n’a finalement pas eu lieu, alors qu’il avait été amorcé dans le cap affiché par la politique étrangère dans le contexte de la politique de détente des années 1970-1980. Les seules modifications que l’on puisse constater concernent l’idée que l’ennemi devait être éliminé et qu’il était « fasciste ». Dans le contexte des premières années, au moment où se définissaient les objectifs politiques et stratégiques du « combat pour l’unité de l’Allemagne », ces attributs de l’ennemi avaient encore une dimension opérationnelle. Mais lorsque les dirigeants est-allemands se furent détournés de l’unité pour se concentrer sur le développement de leur propre Etat, ces attributs n’eurent plus la même utilité : la question de « l’élimination de l’ennemi » ne se retrouve plus que sous la forme d’une option théorique, conséquence logique du processus mondial inévitable, anticipé par la théorie sociale marxiste-léniniste, de passage d’une société capitaliste à une société socialiste puis communiste. Dans la deuxième moitié des années 1980, on constate cependant que les fronts se durcirent dans la discussion politique interne entre les partisans d’une réforme et les opposants déclarés, parmi lesquels les groupes du mouvement pour la paix. L’érosion de l’image de la République Fédérale comme ennemi, accélérée par le discours consensuel des élites politiques sur la question germano-allemande, y a sans doute largement contribué.