Maurras a exercé sur Gide une influence ambivalente et relativement durable, notamment de la querelle de 1903 jusqu'à la publication des Faux-Monnayeurs, en 1925. Comme écrivain et comme chef de la N.R.F., Gide a été souvent contraint de définir sa position idéologique, mais aussi littéraire, face à Maurras et à l’Action française, dans le contexte d’une réaction générale contre la décadence, propre à mettre en question la définition même de l’écrivain et de la littérature. En 1903, Gide affronte Maurras sur le terrain idéologique, en débattant de la thèse barrésienne du racinement. Dans les années suivantes, il se rapproche de Maurras et de l’Action française, tout en continuant de prôner une nette séparation entre l’art littéraire et l’engagement politique. Il subit fortement l’attraction du maurrassisme durant la Grande Guerre, avant de prendre ses distances en redéfinissant la fonction de l’écrivain, dès 1920, puis de faire l’inventaire du maurrassisme dans Les Faux-Monnayeurs. La relation entre Gide et Maurras épouse donc assez exactement la courbe générale du rayonnement de Maurras dans le monde intellectuel et littéraire, de l’Affaire au milieu des années 20.

Maurras’s influence on Gide was ambiguous and relatively prolonged, particularly between their quarrel in 1903 and the publication of Les Faux-Monnayeurs in 1925. As a writer and head of the N.R.F., Gide was forced to define both his ideological and, frequently, his literary position in relation to Maurras and the Action française, within the context of a broader reaction against decadence that served to call into question the very definition of the writer and of literature.
In 1903 Gide confronted Maurras on ideological terms, in the debate over Barrès’s ideas on "rootedness". Subsequently, he drew closer to Maurras and Action française, all the time calling for a clear distinction between the art of literature and political commitment. He was strongly attracted by Maurrassism during the Great War, before taking his distance through a re-evaluation of the writer’s role around 1920, and his inventory of Maurras’s ideas in Les Faux-Monnayeurs. Gide’s relation-ship with him thus precisely follows the general curve of Maurras’s impact on literary and intellectual life from the Dreyfus affair to the mid-1920s.