L'article propose d’étudier les effets de sens illocutoires du verbe modal pouvoir. La tradition distingue entre emplois "radicaux" re­levant de la modalité du faire et emplois relevant de la modalité de l’être, que H. Kronning subdivise en emplois aléthiques et épisté­miques. Depuis les années 1980, on a observé que certains effets de sens de pouvoir – mais également de devoir – échappent à cette catégorisation. Van der Auwera & Plungian (1998) ont qualifié ces emplois comme « postmodaux » dans la mesure où 1) ils ne se lais­sent pas décrire de façon satisfaisante en termes de nécessité et de possibilité et 2) en diachronie, ils sont créés à partir des emplois mo­daux radicaux, épistémiques ou aléthiques. Ces effets, observés dans beaucoup de langues, sont pour la plupart de nature illocutoire. En linguistique française, ces emplois sont relativement peu étudiés. Cet article propose un inventaire non exhaustif des emplois illocu­toires du verbe pouvoir et tentera d’expliquer ces valeurs à partir de sa valeur modale littérale. On distinguera trois grandes catégories d’emplois illocutoires de pouvoir selon que le verbe : 1) s’intègre dans une injonction ou requête par acte de langage indirect ou 2) con­tribue à une modulation de la force illocutoire de l’énoncé, sans changement de type énonciatif, ou 3) permet d’exprimer un acte de langage ordinaire tel que le reproche ou la menace, pour lequel il n’existe pas de forme syntaxique spécifique.