La connaissance de soi est au centre de la pensée des socratiques. Tout en en faisant la marque propre du personnage de Socrate et de sa recherche de la vie bonne, Platon développe pour son propre compte les idées de Socrate sur la connaissance de soi, et ce, de plusieurs façons. un trait commun à ses analyses est l'intuition que notre conscience de nous-même est déterminée, au moins en partie, par des facteurs extérieurs à l'individu. Cet article apporte des arguments précis à l'appui de cette thèse.
La première partie esquisse une interprétation de certains aspects de l'Apologie, où Platon paraît convaincu de ce qu'une pleine connaissance de soi inclut des éléments d'objectivité. La deuxième et la troisième partie sont consacrées respectivement au Charmides et au Premier Alcibiade, qui impliquent tous les deux que l'individu, pour acquérir une compréhension complète de lui-même, a besoin de se détourner de lui-même vers des faits et des valeurs objectifs. La quatrième partie applique cette conclusion à une difficulté soulevée par l'allégo-rie de la Caverne au livre VII de la République, et propose un essai de solution de cette difficulté. La dernière partie compare l'analyse platonicienne avec celle des cyrénaïques, qui soutiennent que la connaissance de soi se réalise de manière introspective grâce au sens intime. L'article s'achève sur quelques remarques concernant l'importance de la connaissance de soi pour la moralité, et la pertinence de l'analyse platonicienne pour l'éhique et la philosophie de l'esprit contemporaines.