On propose ici une lecture de la Métaphysique inspirée de E, 2, 1026a33-b2, prenant la dunamis et l'energeia comme principal sens de l'être. Le couple conceptuel de l'en-puissance et de l'acte fournit ainsi à la fois le principe d'une réponse possible à la question disputée de la « science recherchée », et le fondement d'une ontologie singulière, que l'on caractérise comme une ontologie axiologique. On commence par analyser la signification de ces notions telle qu'elle se déploie en Métaphysique D et Q : au terme de cette analyse, l'acte apparaît comme nommant l'identité réelle, ou réalisée, de l'être et du bien, et l'en-puissance, cette identité comme à réaliser. On montre ensuite, en suivant Z et H, comment le couple de la dunamis et de l'energeia, et non celui de la matière et de la forme, est au principe de la substance sensible, puis, à partir de L (en particulier L, 5, 1071a3-6), comment la dunamis et l'energeia valent, par-delà les substances sensibles, comme les principes communs à toutes les substances, sous la modalité spécifique de l'analogie. Le couple de l'en-puissance et de l'acte assure ainsi à la fois la généralité du discours ousiologique, et le primat réel du principe théologique (qu'Aristote désigne toujours comme acte, et jamais comme forme). On montre enfin comment dunamis et energeia fondent non seulement une ousiologie unitaire, mais aussi une ontologie générale, en ce qu'elles s'appliquent, sous certaines conditions, aux êtres mathématiques. On s'interroge, pour finir, sur la signification de l'inversion, par Plotin, de la dunamis aristotélicienne, et de la désignation du Premier Principe non plus comme acte pur, mais comme « puissance de tout (dunamis pantôn) ». En ce geste plotinien, on reconnaît l'origine d'un mouvement d'identification du divin non plus au bien, comme le faisait Aristote à travers la notion d'acte pur, mais à la puissance - à une puissance qui, ultimement, pourra être pensée comme excédentaire au bien. Comme la théologie de l'acte pur, cette ontologie axiologique de l'en-puissance et de l'acte est victime d'un oubli dont, en conclusion, est brièvement esquissée l'histoire.