Mon but est d'examiner en détail les arguments avancés par Vernant au début des années soixante du siècle dernier, quand il a caractérisé, selon une formule célèbre, la philosophie comme « fille de la Cité » (fille de la polis). Mon argument principal est que le concept d’isonomia, qui n’est central dans le débat politique athénien que depuis les dernières décennies du VIe siècle, ne peut être aussi facilement utilisé pour rendre compte de la nouvelle conception de l’espace physique, qui émerge à Milet au début de ce siècle. En tout cas, l’utilisation de modèles politiques dans la science grecque ancienne de la nature est un procédé conscient, comme je tente de le montrer en analy­sant certains textes célèbres comme le fragment 4 d’Alcméon et le fragment 1 d’Anaximandre. De plus, dans le cas d’Anaximandre on peut se demander si l’explanandum dans l’analogie était l’ordre du monde ou plutôt celui de la polis.

Summary. My aim is to examine in detail the arguments put forward by Vernant in the early sixties of the past century, when he famously characterized Greek philosophy as "fille de la Cité" (daughter of the polis). My main point is that the category of isonomia, which is central in the political debate of Athens only since the last decades of the sixth century, cannot be easily used to explain the new conception of physical space, which emerges in Miletos at the beginning of that century. In any case, the use of political models in the early Greek science of nature is a conscious one, as I attempt to show by analysing some famous texts like Alcmaeon’s fragment 4 and Anaxi­mander’s fragment 1. Moreover, in Anaximander’s case one may wonder if the explanan­dum in the analogy was the order of the world or rather of polis.