Cet article vise à reconstituer l'histoire du lien que le Pseudo-Lon­gin et Quintilien établissent entre la phantasia, qu’ils définissent comme une faculté de visualisation mentale, et l’enargeia, l’évidence du discours. De fait, les deux notions sont déjà réunies dans le Portique, qui associe l’enargeia à la repré­sentation compréhensive (phantasia kataleptike), définie comme le support de la connaissance et de l’action. Or le traité Du sublime évoque un glissement de la définition stoïcienne de la phantasia, qualifiée de « commune », à celle de la phantasia rhétorique, présentée comme le résultat d’une spécialisation de la première et toujours associée à l’enargeia. Cette relation originale, reprise par Quintilien, permet de saisir les fondements philosophiques des théories rhétoriques de l’image et révèle la perméabilité entre les deux domaines à l’époque romaine.