A l'occasion des Jeux olympiques d'Athènes, en 1896, Charles Maurras, envoyé comme journaliste par la Gazette de France, découvre, ébloui, la Grèce antique, qui lui inspire de nombreuses œuvres, entre autres Anthinéa en 1901, puis les Vergers sur la mer. La Grèce ancienne, en général, et l'Athènes du Siècle de Périclès en particulier, constituent pour lui, sur le plan esthétique, l'expression suprême de la beauté, et, sur le plan philosophique, la naissance de la raison. Par l'intermédiaire de la Provence, terre natale du chef de file de l'Action française, le génie français a été à son tour fécondé par l'héritage grec. Par ce détour, le natif de Martigues célèbre à l'unisson et la culture française et la civilisation provençale que le Félibrige est en train de réhabiliter. Cependant, cette vision de l'Antiquité n'est pas univoque. Maurras dénonce à plusieurs reprises la contamination de cette pureté athénienne par les germes destructeurs inoculés à l'Occident hellénistique par l'Orient sémite. Rome elle-même est adulée parce qu'elle a répandu dans le bassin méditerranéen les bienfaits de la pensée grecque et vertement critiquée parce qu'elle fut aussi le Cheval de Troie de la « lèpre » du judaïsme et du christianisme, les quatre évangélistes étant considérés comme quatre « juifs obscurs ».
La Grèce ancienne est donc chez Maurras le sujet d'une brillante méditation littéraire sur la fuite du temps et l'écroulement des empires, dans le prolongement des voyages en Orient de Chateaubriand, Lamartine, Gérard de Nerval, mais aussi le prétexte à un inquiétant exercice de pathologie politique, culturelle et sociale. Du reste, en 1921, dans son livre subtil sur Les Idées de Charles Maurras, - découpé en quatre séquences : Lumière de Grèce. Air de Provence. Pierre de Rome. Terre de France-, Albert Thibaudet démontre que l'instrumentalisation de l'Antiquité grecque et romaine forme le socle, le soubassement idéologique du nationalisme intégral de Maurras.

At the time of the 1896 Athens Olympics to which he had been sent as a correspondent by the Gazette de France, Charles Maurras was enchanted by his discovery of ancient Greece. These strong impressions were to inspire a series of works throughout his life, continually enriched by superb imagery and new ideas. Notable amongst these are Anthinéa (1901) and Les Vergers sur la mer, works which serve in some ways as his Prière sur l'Acropole. Ancient Greece in general, and Periclean Athens in particular, represent for Maurras the supreme expression of beauty in aesthetic terms, and the birth of reason within philosophy. Mediated by Provence, the birthplace of the leader of Action française, the genius of France had in its turn been enriched by the heritage of Greece. Through this lineage, the son of Martigues celebrated the unity of French culture and the Provençal civilization currently revived by the Félibrige. Yet this vision of Antiquity is not monolithic. On several occasions, Maurras condemns the contamination of Athenian purity by the destructive germs through which the semitic Orient infected the Hellenistic west. He at once praises Rome itself for extending the benefits of Greek thought throughout the Mediterranean basin and roundly criticizes it as the Trojan horse for the "leprosy" of Judaism and Christianity, qualifying the Apostles as four “obscure Jews.”
For Maurras, ancient Greece is thus simultaneously the basis for a brilliant meditation on the passage of time and the collapse of empires, in the spirit of the orientalist travel accounts of Chateaubriand, Lamartine and Gérard de Nerval, and the pretext for a disturbing exercise in political, social, and cultural pathology. Moreover, in his rich and subtle study Les Idées de Charles Maurras (1913), Albert Thibaudet demonstrates how the instrumentalization of ancient Greece and Rome provides the ideological foundations for Maurras’s integral nationalism.