La croyance selon laquelle le renouveau politique, social et culturel de la France dépendait de la réorientation de ses valeurs intellectuelles est un élément constitu-tif de l'idéologie de l’Action française. Charles Maurras fit de cette exigence la pièce centrale de son ouvrage L’Avenir de l’intelligence, publié pour la première fois en 1905 ; la création de l’Institut d’Action française l’année suivante prouva le sérieux de la détermination qu’avait le mouvement d’effectuer une réorientation radicale de la vie intellectuelle française. Mais si les arguments et le programme de l’Action française précédèrent la Grande Guerre, ce sont les débats intellectuels des années de guerre -et plus particulièrement la discussion incessante et passionnée au sujet des mérites et défauts de la philosophie kantienne- qui permirent aux néo-monarchistes de s’en prendre aux défenseurs de la Troisième République. Ceux-ci conférèrent à l’Action française une réputation de prescience intellectuelle qui aurait manqué avant 1914. La critique des principes kantiens fournit donc au mouvement le moyen idéal de combattre de manière continue à la fois l’ennemi allemand et la Troisième République.

Fundamental to the ideology of the Action française was the belief that the political, social, and cultural renewal of France depended upon a reorientation of intellectual values. Charles Maurras made this claim the centerpiece of his extended essay, L’Avenir de l’intelligence (first published in 1905), and the creation of the Institut de l’Action française a year later demonstrated how serious the movement was in its determination to effect a radical reorientation of French intellectual life. But if the intellectual arguments and agenda of the Action francaise predated the Great War, it was the intellectual debates of the war years – most particularly an ongoing, impassioned debate about the merits and flaws of Kantian philosophy that continued to pit neo-royalists against defenders of the Third Republic – that bestowed upon the Action française a reputation for intellectual prescience that it had lacked prior to 1914. In it persistent critique of Kantian principles the Action française found the perfect vehicle for waging intellectual warfare against both the German enemy and the Third Republic.