Avant de devenir le chroniqueur de politique étrangère bien connu ou l'historien vulgarisateur et engagé, Jacques Bainville entre dans la carrière littéraire par une série de critiques littéraires de 1901 à 1908. Par ailleurs, son éclectisme l’amène aussi à s’essayer, pendant une année, à la critique théâtrale en 1912. Classé à l’extrême droite dans l’historiographie contemporaine, le cercle politique dont Bainville faisait partie fera l’objet de quelques commentaires dans le sens de la nuance. Les critiques culturelles qu’il écrit dans plusieurs journaux avant la Grande Guerre en sont des exemples évidents. A la fois classiques et conservatrices, elles savent aussi apprécier la nouveauté et l’originalité. Elles peuvent douter des hauteurs de vue et du classicisme extrême d’un Maurras, tout en refusant le ro-mantisme, le naturalisme et le sentimentalisme du XIXe siècle. Quant au style, Bainville peut se révéler tranchant, mais aussi faire preuve de finesse et de nuance. Surtout, on décèle dans cette œuvre une réelle sensibilité que l’on dira absente de son œuvre d’après-guerre. Il apparaît finalement que le constat de René Rémond sur la complexité des composantes et des piliers de l’Action française se trouve une nouvelle fois confirmée.

Before emerging as a well-known commentator on foreign affairs or a popularizing and militant historian, Jacques Bainville initiated his literary career with a series of book reviews written between 1901 and 1908. Moreover, his eclecticism also led him towards theatrical revieing, which he undertook during 1912. Bainville’s political circle, seen as part of the extreme right in contemporary historiography, is here reconsidered. The cultural criticism written for a number of journals before World War One offers an obvious example. At once classical and conservative, they also evince appreciation for novelty and originality. They reveal skepticism for the imperiousness and extreme classicism of Maurras, while repudiating 19th-century romanticism, naturalism and sentimentalism. Stylistically, Bainville is at once trenchant, but also capable of finesse and subtlety. Above all, his work reveals a real sensibility apparently missing in his post-war work. Bainville’s example once again confirms René Rémond’s assessment of the complexity of the constitutive members and leadership of Action française.