Les Algériens représentent 2% de la population du département du Nord, 3% de celle de la métropole lilloise. L'ensemble des étrangers atteint des pourcentages trois fois plus élevés. Nous croyons connaître les travailleurs immigrés, nous les cotoyons tous les jours mais nous sommes surpris lorsque, brusquement, une grève de la faim révèle qu'ils aspirent à etre mieux traités. Ce petit livre vient à son heure. Il nous aide à réfléchir sur le problème des bas salaires, sur le sort de tous ceux qui occupent des emplois délaissés et pourtant indispensables. Nous voulons tous avoir des villes plus propres mais acceptons-nous d'en payer le prix, c'est-à-dire de mieux considérer ceux qui les nettoient? Nos industries fondamentales - sidérurgie, mécanique, textile, bâtiment - sont de grandes consommatrices de main-d'oeuvre étrangère. Admettons-nous vraiment qu'il n'y a pas de sot métier et cherchons-nous à améliorer la qualification et les conditions de travail du plus grand nombre possible d'hommes. Enfin, dans notre civilisation urbaine et industrielle, avons-nous conscience que certains groupes étrangers sont plus défavorisés que les autres parce qu'ils ont conservé une forte originalité culturelle? Celle-ci les sépare de nous mais représente une authentique richesse humaine pour notre région. L'immigration algérienne entraîne la formation d'une communauté musulmane qui comprend dans notre département une majorité de femmes et d'enfants, constitue un petit Maghreb au milieu de nous. Aussi cette étude n'enquête pas seulement sur une situation économique et sociale et sur son évolution depuis trente ans; elle décrit également des traditions, des fêtes, des mentalités, elle évoque la psychologie des travailleurs algériens. D'autre part, nos rapports humains avec les pays les plus pauvres ne se réduisent pas à de bonnes paroles distribuées au loin lors de voyages agrémentés par le charme de l'exotisme et un parfum d'aventure. Ils commencent dans nos murs avec les immigrants qui sont les ambassadeurs du Tiers Monde parmi nous. Or leur accueil, leur logement, leur scolarisation, leur formation profesionnelle, la reconnaissance de leurs droits sociaux laissent à désirer. L'observation de la communauté algérienne du Nord permet de préciser les problèmes qui restent à résoudre et de suggérer les améliorations souhaitables.